Parmi les nombreux cultes à mystères qui se sont propagés en Méditerranée avant l’avènement du christianisme, l’un des plus connus, celui de la ville d’Éleusis, nous intrigue encore aujourd’hui.
Les cultes à mystères ont baigné le bassin méditerranéen pendant des siècles, avant que le christianisme ne s’impose majoritairement vers l’an 400. Leurs origines sont variées, et difficiles à dater précisément, car l’écriture n’était pas répandue de manière uniforme.
Cependant, ils présentaient de nombreux points communs, comme la vénération de dieux multiples, un clergé dédié, des initiations secrètes et de longs rituels ayant pour but de transformer les pratiquants et leur apporter l’immortalité de l’âme.
En effet, inspirés par les demi-dieux Héraclès et Dionysos qui y étaient parvenus, les hommes avaient pour objectif de rejoindre le monde des dieux à leur mort. Parmi les cultes à mystères, le plus connu est celui ayant pris place en la ville d’Éleusis, non loin d’Athènes qui était alors un centre politique et culturel primordial.
Le culte d’Éleusis était voué à Déméter, la déesse de la terre et des moissons, sa fille Perséphone et Hadès, le gardien des enfers. Le mythe fondateur raconte que lors d’une promenade, Coré – la fille de Déméter qui deviendra plus tard Perséphone – est enlevée par Hadès qui l’emmène dans son royaume des enfers.
Ne trouvant plus sa fille, Déméter se déguise en vieille femme et parcourt le monde à sa recherche. Elle sera accueillie par le roi et la reine d’Éleusis, dont elle rendra le fils immortel. Vénérée pour ce cadeau, elle transmettra aussi des secrets du culte qui lui sera ensuite dédié. Malgré tout furieuse de ne pas trouver sa fille,
Déméter refuse la fertilité de la terre, et les hommes, affamés par la disette, supplient les dieux d’intervenir. Ainsi, un accord est passé avec Hadès pour qu’il permette à Coré, devenue Perséphone son épouse, de passer la moitié de l’année sur terre et l’autre aux enfers (certains textes évoquent cependant huit mois sur terre).
Les rituels connus du culte d’Éleusis s’appellent les mystères : les « petits » se déroulaient au printemps.
« La première phase comporte un sacrifice sanglant en l’honneur des deux déesses, suivi par une cérémonie de purification, qui a lieu dans la rivière Ilisos, et les mystes, les candidats à l’initiation des grands mystères qui auront lieu plus tard, y étaient préparés », explique l’historien Jean-Michel Dufays.
Les « grands » mystères se situaient à l’automne et comportaient deux voyages : un aller d’Éleusis à Athènes, se finissant par une cérémonie de purification dans la mer.
Puis un retour à Éleusis, composé d’un grand cortège aux multiples participants : les autorités religieuses, les mystes déjà initiés et ceux souhaitant l’être, mais aussi la population qui ne pourra cependant pas pénétrer dans le sanctuaire. Malgré tout, les initiations étaient accessibles à tout Grec, libre ou esclave, y compris les femmes.
Trois phases composaient le rituel final des grands mystères, dirigées par un hiérophante et sa parèdre, la prêtresse de Déméter. Celle de l’absorption du cycéon, un breuvage qui aurait comporté de l’ergot de seigle, celle du jeu des allégories et enfin celle de l’exposition des hiera, les objets sacrés.
À ce moment, des secrets, des phrases rituelles, des mots de passe étaient divulgués. De nombreux auteurs grecs ont ensuite témoigné du culte d’Éleusis, tels Sophocle, Aristote ou Plutarque, qui a gardé la réputation d’ouvrir les consciences…
(Source : INREES)