Le miel, berceau de l’humanité… et de l’innovation ? (vidéo)

Nectar sacré depuis des millénaires, aux nombreuses vertus médicinales, symbole puissant de l’ésotérisme, le miel peut aussi être à l’origine de technologies innovantes et de systèmes d’organisation des abeilles. Préserver la biodiversité grâce à ce précieux rayon d’or, tel est de nos jours l’un des enjeux qu’il représente.

Les hommes, attirés par le sucre nécessaire au développement de leur cerveau, ont rapidement découvert le miel il y a plus de 5 millions d’années. Dans son ouvrage consacré à l’histoire du miel, la journaliste Marie-Claire Frédéric remonte à la Préhistoire :

« Les australopithèques utilisaient le miel à la fois comme un aliment complet contenant du glucose ainsi que des protéines, grâce aux larves d’abeilles, mais également comme colle pour leurs armes ou pour étanchéifier des pots en roseaux, grâce à la cire. »

Nectar sacré et utilisé pour la santé

Le miel et les techniques de récolte sont présents dans toutes les grandes civilisations, parfois associés à des croyances ou des symboles spirituels.

Dans l’Égypte antique, le bourdonnement des abeilles est en lien avec l’énergie créatrice du monde. Il est assimilé à un son rythmé, souvent comparé à la musique des sphères.

On le retrouve dans les enseignements sous forme des écoles de « mystères », ce dernier terme renvoyant à l’époque à une sagesse secrète.

Ces rites portaient leurs transmissions sur la vie, la mort et la résurrection. Les Égyptiens utilisaient d’ailleurs le miel et la cire pour embaumer leurs morts.

Dans sa thèse de pharmacologie, Alexandra Rossant précise que

« même Hippocrate (460-377 av. J.-C.), “père spirituel” de la médecine moderne, disait que l’usage du miel conduisait à la plus grande vieillesse et il le prescrivait pour combattre la fièvre, les blessures, les ulcères et les plaies purulentes ».

Ces prescriptions continuent d’être appliquées puisque plusieurs maternités distribuent des petits sachets de miel aux jeunes mamans, à appliquer sur les mamelons en cas de crevasses lors de l’allaitement.

Les Grecs et les Romains faisaient de même et étalaient le miel sur leur peau pour ses propriétés adoucissantes, régénératrices, nourrissantes et hydratantes. La chercheuse préconise dans sa thèse de recommander le miel aux enfants :

« Pour les enfants dont le besoin en aliments énergétiques est bien connu, le miel apporte cette énergie disponible rapidement. On lui attribue également un effet bénéfique sur la croissance et sur la composition sanguine en favorisant une meilleure oxygénation. En effet, certains miels contiennent du fer et du cuivre ; le fer est présent dans l’hémoglobine au niveau de l’hème, et assure le transport de l’oxygène, alors que le cuivre est nécessaire à la synthèse et à la régénération de cette hémoglobine. Le miel favorise également l’assimilation du calcium et la rétention du magnésium par l’organisme contribuant ainsi à une meilleure calcification osseuse et dentaire. »

Pour les aînés, le miel est tout aussi utile pour d’autres raisons : mauvais appétit, digestion difficile, fonctionnement intestinal perturbé, perte d’énergie, fatigue, carences en vitamines et en oligoéléments.

« Sa consommation régulière pourrait venir en aide aux personnes âgées pour pallier leurs déficits, en particulier en augmentant leur appétit. Les principes aromatiques et les acides présents dans le miel influencent favorablement la digestion en stimulant les glandes salivaires. »

De nombreuses entreprises cosmétiques ou pharmaceutiques développent « l’apithérapie ».

Les principes aromatiques et les acides présents dans le miel influencent favorablement la digestion en stimulant les glandes salivaires.

Innovations mellifères

Le miel intéresse également la technologie. Dans une étude publiée dans le Journal of Physics D: Applied Physics, des chercheurs de l’université d’État de Washington (WSU) démontrent la fabrication d’un « memristor » en utilisant du miel.

« Il s’agit d’un composant similaire à un transistor, qui peut non seulement traiter, mais aussi stocker des données dans sa mémoire interne. » Pour le fabriquer, ils ont d’abord traité le miel de façon à le rendre solide, puis l’ont placé entre deux électrodes métalliques pour faire office de « neurone ».

Feng Zhao, professeur agrégé de l’École d’ingénierie et d’informatique de la WSU et auteur correspondant de l’étude précise son utilité :

« Si nous pouvons intégrer des millions ou des milliards de ces memristors de miel ensemble, alors ils peuvent être transformés en un système neuromorphique qui fonctionne un peu comme un cerveau humain. »

Pour quelles raisons ces chercheurs ont-ils pensé à choisir le miel comme composant ? Le professeur Feng Zhao explique :

« Le miel ne se gâte pas. Il a une très faible concentration d’humidité, de sorte que les bactéries ne peuvent pas y survivre. Cela signifie que ces puces informatiques seront très stables et pendant très longtemps. Ce matériau est de plus soluble dans l’eau, donc biodégradable. »

Autre innovation porteuse d’espoir pour la biodiversité : la collaboration entre le Centre de formation et de recherche APINOV, basé à La Rochelle, l’INRAE d’Avignon (l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et l’entreprise BeeGuard, spécialiste de la ruche connectée.

Le déclin des abeilles et donc du miel, constaté depuis une vingtaine d’années par Benjamin Poirot, dirigeant d’APINOV, n’a pour le moment aucune explication scientifique.

Pour y remédier, ces trois entités mettent en place un réseau international de surveillance des ruches. Grâce à l’intelligence artificielle, les caméras placées dans les ruches reconnaissent les abeilles et les comptent.

Résultat : suite aux deux premières années d’observation, on sait à présent que selon les colonies, entre 500 et 1 500 abeilles meurent quotidiennement.

« Sachant que la reine pond 2 000 œufs par jour, ça n’est pas catastrophique, mais ce qui nous intéresse c’est de modéliser la vie d’une colonie en fonction de différents paramètres : la température, la saison, le climat, etc. pour savoir ce qui est normal et ainsi lancer rapidement l’alerte en cas de problème. »

En coopérant avec ces sentinelles de l’environnement, nous deviendrons à notre tour des mammifères sociaux, où l’ego ne prime pas, seule compte la survie des gènes.

Nous ne cesserons donc jamais d’être inspirés par les abeilles et leur précieux miel, à l’image de l’entreprise CityBzz qui utilise par biomimétisme l’organisation d’une ruche pour créer un nouveau modèle de management.

(Source : INREES)

Pour aller plus loin :
– « Le miel, un composé complexe aux propriétés surprenantes », thèse de pharmacologie d’Alexandra Rossant, université de Limoges, disponible en lecture intégrale.
– APINOV, Benjamin Poirot.
– CityBzz, « Projet abeille et biomimétisme ».

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