La lumière polarisée de la comète interstellaire 2I/Borisov livre un de ses secrets (vidéo)

Vue d’artiste de la comète interstellaire 2I / Borisov lors de son voyage à travers notre système solaire.

De précédentes études concernant  la comète interstellaire 2I/Borisov avaient montré qu’elle était atypique par rapport aux comètes du Système solaire. Mais, finalement, en utilisant le phénomène de polarisation de la lumière, on a découvert qu’elle ressemblait à la comète Hale-Boop. Cela a des implications sur l’histoire passée et l’origine de 2I/Borisov.

On fait souvent remonter la naissance de l’astrophysique, qui se distingue de l’astronomie fondée uniquement sur des mesures d’angles et de temps sur la voûte céleste, à la découverte des principes de la spectroscopie par Kirchhoff et Bunsen vers 1860. Mais en fait, elle prend naissance presque 50 ans plus tôt avec les travaux sur la polarisation du Français François Arago qui vont lui permettre pour la première fois d’avoir des renseignements sur la physique des corps célestes.

Dès le début des années 1810 il détermine ainsi, en étudiant la polarisation de la lumière du Soleil, que sa surface ne peut être celle d’un solide ou d’un liquide chauffé mais qu’elle est forcément à l’état gazeux, ce qui relève bien de la physique et pas de l’astronomie. Il fera également des observations concernant la lumière de la Lune.

L’étude de la polarisation des ondes lumineuses va ensuite se poursuivre car on peut l’utiliser pour avoir des renseignements sur les minéraux des roches et sur la structure des molécules. On s’en sert également depuis longtemps pour étudier les surfaces planétaires comme on peut s’en rendre compte en lisant l’article consacré à ce sujet par l’astrophysicien Audouin Dollfus, découvreur de Janus, qui avait déterminé de cette manière, et le premier, que la surface de Mars devait contenir un oxyde de fer.

Une illustration beaucoup plus récente de l’intérêt toujours moderne de l’étude de la polarisation de la lumière des astres en astrophysique a été fournie par la collaboration EHT qui a obtenu des renseignements sur les champs magnétiques associés au trou noir supermassif M87* et à son disque d’accrétion.

 

De la polarisation de la lumière des planètes à celles des comètes

Pas en reste, des astrophysiciens font savoir aujourd’hui via deux publications respectivement dans Nature Communications et Nature Astronomy qu’ils ont fait des découvertes intéressantes sur la composition et l’origine de la fameuse comète interstellaire 2I/Borisov, qui avait été identifiée par l’astronome amateur Gennady Borisov en août 2019. Elles proviennent de l’analyse de données qui ont été collectées à l’aide du Very Large Telescope de l’Observatoire européen austral (le VLT de l’ESO) et de l’Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (Alma), un autre instrument de l’ESO.

Dans le premier cas, ces informations ont été obtenues par polarimétrie justement, c’est-à-dire en étudiant la lumière polarisée émise par la surface de la comète.

Ce faisant, ces astrophysiciens se posent en dignes héritiers d’Arago puisque lui-même avait pavé le chemin en étudiant la polarisation de la lumière de la comète C/1819 N1 Tralles, en 1819, et celle de la comète de Halley, en 1835.

Ils profitaient également des travaux passés de leurs collègues qui avaient fait de même avec d’autres comètes. En l’occurrence, c’est la comparaison avec les polarisations obtenues concernant la comète C/1995 O1, alias la célébrissime Hale-Bopp, qui a été particulièrement intéressante. En effet, la polarisation de la lumière émise par 2I/Borisov différait de toutes celles des autres comètes à l’exception de celle de Hale-Bopp qui s’est avérée similaire.

Or, Hale-Bopp est une comète longue période et sa différence avec toutes ses cousines avait suggéré qu’elle n’était passée qu’une seule fois proche du Soleil il y a des milliers d’années. Sa composition aurait donc été que peu modifiée par le rayonnement et le vent solaire, en faisant un témoin particulièrement précieux de la matière primitive avant qu’elle ne s’effondre pour donner le disque protoplanétaire du Système solaire.

En suivant le même raisonnement, les astrophysiciens pensent que la comète interstellaire n’était jamais passée près d’une étoile avant de frôler le Soleil en 2019. Elle doit donc, elle aussi, garder la mémoire du nuage de gaz et de poussière où elle est née et qui a dû donner également une ou plusieurs protoétoiles.

Le fait que 2I/Borisov soit aussi proche de Hale-Bopp laisse donc penser que la nébuleuse primitive à l’origine de notre Système solaire avait probablement une composition très similaire, ce qui laisse songeur quant à l’universalité des conditions favorables à l’apparition de la vie dans la Voie lactée.

C’est bien ce qu’explique Alberto Cellino, de l’Observatoire d’astrophysique de Turin, Institut national d’astrophysique (INAF), Italie, coauteur de l’étude, dans le communiqué de l’ESO annonçant les deux articles :

« Le fait que les deux comètes soient remarquablement similaires laisse supposer que l’environnement dans lequel 2I/Borisov a vu le jour n’est pas si différent, en matière de composition et de l’environnement des débuts du Système solaire. »

Son collègue Olivier Hainaut, astronome à l’ESO en Allemagne, qui étudie les comètes et d’autres objets géocroiseurs mais qui n’a pas participé à cette découverte en convient également, toujours dans le même communiqué :

« Le résultat principal – à savoir que 2I/Borisov ne ressemble à aucune autre comète à l’exception de Hale-Bopp – est très fort. Il est très plausible qu’elles se soient formées dans des conditions très similaires. »

Les comètes interstellaires, des clés pour la cosmogonie comparée

Autant dire qu’il serait du plus haut intérêt pour mieux comprendre la formation des planètes que d’étudier de plus près une autre comète interstellaire, ce qui pourrait être accompli au moyen de la mission de l’ESA qui est à l’étude : Comet Interceptor.

Les données collectées avec Alma ont concerné aussi bien les poussières dans la coma de 2I/Borisov que les abondances relatives des molécules d’eau et de monoxyde de carbone. Ces abondances ont évolué avec le dégazage de la comète au fur et à mesure qu’elle se rapprochait du Soleil.

Cela suggère une composition hétérogène de 2I/Borisov qui serait donc le résultat d’une accrétion de matériaux nés dans différentes parties du système planétaire en cours de formation par effondrement gravitationnel.

Dans le cas du Système solaire, les météorites témoignent d’un processus de mélange entre les parties internes et externes du disque protoplanétaire et l’on sait que les géantes gazeuses ont conduit à des éjections de petits corps formés proches du jeune Soleil vers les régions externes du Système solaire.

Là encore 2I/Borisov nous donne des indices laissant penser que ce qui s’est passé dans notre cas n’est probablement pas atypique, au moins sur certains aspects, dans le domaine de la cosmogonie planétaire.

(Source : Futura Sciences)

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